Qu’est-ce qu’une serre à énergie passive et comment elle fonctionne en permaculture ?

Une serre à énergie passive est une structure conçue pour capter, stocker et utiliser la chaleur solaire de manière optimale, sans recours à des sources d’énergie externes pour le chauffage. En permaculture, où l’objectif est de créer des écosystèmes productifs et résilients tout en minimisant l’empreinte écologique, ces serres offrent une solution idéale pour prolonger la saison de culture, protéger les plantes des conditions climatiques extrêmes et maximiser la production alimentaire tout au long de l’année. Contrairement aux serres traditionnelles qui peuvent nécessiter des systèmes de chauffage coûteux et énergivores, les serres passives utilisent les principes de design passif pour réguler la température intérieure, en se basant sur l’orientation solaire, l’isolation thermique, et l’utilisation de matériaux à forte inertie thermique. Voici comment fonctionne une serre à énergie passive en permaculture, ses avantages et comment la concevoir pour qu’elle soit efficace et durable.

Principe de fonctionnement d’une serre à énergie passive : Capturer, stocker et restituer la chaleur solaire

Le principe fondamental d’une serre à énergie passive repose sur la capacité de la structure à capter et à stocker la chaleur solaire durant la journée pour la restituer progressivement la nuit, tout en évitant la surchauffe en été. Cette régulation thermique naturelle permet de maintenir un microclimat stable et favorable à la croissance des plantes, même en période de froid.

Orientation et conception bioclimatique : Maximiser les apports solaires et minimiser les pertes de chaleur

  1. Orientation au sud pour capter le maximum de soleil :
    • La serre doit être orientée vers le sud (dans l’hémisphère nord) pour capter un maximum de rayons solaires pendant la journée. Les parois sud et le toit, souvent en verre ou en polycarbonate, laissent entrer la lumière et la chaleur, créant un effet de serre.
    • Les parois nord, est et ouest peuvent être isolées ou partiellement opaques pour limiter les pertes de chaleur. En hiver, lorsque le soleil est bas, l’orientation sud permet de profiter des rayons directs, réchauffant efficacement l’intérieur.
  2. Inclinaison du toit pour optimiser la captation solaire :
    • Le toit de la serre doit être incliné à un angle optimal (en général entre 30° et 45°) pour capter le plus de lumière possible en hiver. Cette inclinaison favorise l’entrée maximale des rayons du soleil tout en évitant l’accumulation de neige ou d’eau de pluie.
    • En été, cet angle permet de limiter la surchauffe en réduisant l’angle d’incidence des rayons solaires. Des dispositifs comme des stores ou des toiles d’ombrage peuvent être utilisés pour réguler la lumière.
  3. Murs opaques et isolés au nord :
    • Le mur nord de la serre, souvent construit en matériaux lourds comme la brique, la pierre ou la terre, agit comme un mur trombe. Il stocke la chaleur captée pendant la journée et la restitue la nuit. Il sert également de barrière contre les vents froids.
    • Ce mur doit être bien isolé pour éviter les pertes de chaleur, et peut être peint en couleur sombre pour augmenter l’absorption de la chaleur solaire.

Isolation thermique et inertie : Maintenir une température stable à l’intérieur

  1. Matériaux à forte inertie thermique pour stocker la chaleur :
    • Les matériaux comme la pierre, le béton de chanvre, ou les briques de terre crue, utilisés pour le mur nord ou les massifs de stockage de chaleur à l’intérieur, absorbent la chaleur en journée et la restituent lentement la nuit, évitant ainsi les chutes brutales de température.
    • Ces matériaux peuvent être placés à proximité des plantes pour diffuser une chaleur douce, protégeant ainsi les cultures des températures nocturnes trop basses.
  2. Isolation des parois et du sol :
    • Les parois latérales et le toit doivent être isolés avec des matériaux comme la fibre de bois ou le polycarbonate alvéolaire pour limiter les pertes de chaleur, tout en laissant passer la lumière.
    • L’isolation du sol est également cruciale pour éviter les pertes thermiques par conduction. Une couche de liège, de paille ou de polystyrène extrudé sous le sol peut réduire les pertes de chaleur. Les sols en dalles de pierre ou en béton contribuent également à l’inertie thermique.
  3. Cloches d’eau ou réservoirs d’eau pour augmenter l’inertie thermique :
    • Les réservoirs d’eau, comme des bidons peints en noir et remplis d’eau, placés à l’intérieur de la serre, agissent comme des accumulateurs de chaleur. L’eau absorbe la chaleur le jour et la restitue la nuit, stabilisant ainsi la température intérieure.
    • Ces cloches d’eau ou réservoirs peuvent être placés le long des parois sud ou à l’arrière des rangées de cultures pour maximiser leur efficacité.

Ventilation naturelle et protection contre la surchauffe estivale

  1. Ventilation passive par convection :
    • La ventilation naturelle est essentielle pour éviter la surchauffe en été et pour renouveler l’air. Des ouvertures en partie haute (fenêtres de toit, lucarnes) et basse (portes, châssis) permettent de créer une circulation d’air par convection.
    • L’air chaud, plus léger, s’échappe par les ouvertures hautes, tandis que l’air frais entre par les ouvertures basses. Cette circulation d’air évite l’accumulation de chaleur excessive et maintient un climat intérieur agréable pour les plantes.
  2. Filets d’ombrage et végétation grimpante :
    • Les filets d’ombrage ou les toiles tendues à l’intérieur ou à l’extérieur de la serre limitent l’entrée des rayons solaires directs en été, réduisant ainsi la surchauffe. Ils peuvent être enlevés ou déplacés en hiver pour maximiser les apports solaires.
    • La végétation grimpante, comme la vigne, plantée le long des parois sud ou sur une pergola à l’extérieur, crée une ombre naturelle en été tout en laissant passer la lumière en hiver lorsque les feuilles sont tombées.
  3. Puits canadien ou provençal pour rafraîchir l’air :
    • Un puits canadien, système géothermique utilisant la température stable du sol, peut être connecté à la serre pour pré-refroidir l’air entrant en été. L’air frais circule à travers des tuyaux enterrés avant d’entrer dans la serre, réduisant ainsi la température intérieure.
    • Ce système est particulièrement utile en été pour maintenir un environnement stable et éviter le stress thermique pour les plantes.

Avantages de la serre à énergie passive en permaculture : Productivité et résilience accrue

Les serres passives offrent de nombreux avantages dans un contexte permaculturel. Elles permettent d’augmenter la durée de la saison de culture, d’améliorer la diversité des espèces cultivées et de renforcer la résilience alimentaire face aux aléas climatiques.

Prolongation de la saison de culture et diversification des cultures

  1. Prolonger la saison de culture :
    • En maintenant une température plus élevée à l’intérieur, même en période de froid, la serre passive permet de commencer les semis plus tôt au printemps et de prolonger les récoltes jusqu’à tard en automne.
    • Cela permet de cultiver des légumes, des herbes aromatiques ou des fruits plus longtemps, augmentant ainsi la production alimentaire sur l’année.
  2. Cultiver des espèces sensibles au froid :
    • La serre passive offre un microclimat adapté pour des plantes sensibles aux basses températures, comme les tomates, les poivrons ou les courges. Cela permet de cultiver ces espèces dans des régions aux hivers rigoureux, où elles ne pourraient pas survivre en extérieur.
    • Elle est également idéale pour les semis précoces, les plantes exotiques ou tropicales, qui nécessitent une chaleur constante.
  3. Multiplier les récoltes annuelles :
    • La stabilité thermique et l’humidité contrôlée de la serre passive permettent de réaliser plusieurs cycles de culture par an, en cultivant des légumes à cycle court (salades, radis) entre les cultures principales.
    • Cette intensification des cultures, en respectant les principes de rotation et de polyculture, améliore la productivité du jardin tout en préservant la fertilité du sol.

Protection contre les aléas climatiques et résilience alimentaire

  1. Protection contre le gel et les vents froids :
    • La serre passive protège les plantes des gelées précoces ou tardives, réduisant les risques de perte de cultures. Le mur isolé et les systèmes de stockage de chaleur permettent de maintenir une température positive même en cas de froid intense.
    • Elle offre également un abri contre les vents froids, qui peuvent dessécher les plantes et endommager les cultures.
  2. Régulation de l’humidité et protection contre les précipitations excessives :
    • En contrôlant l’humidité intérieure, la serre réduit les risques de maladies fongiques liées à une humidité excessive. L’aération et la ventilation passive permettent d’évacuer l’excès d’humidité, créant un environnement sain pour les plantes.
    • Elle protège également les cultures des précipitations excessives, comme la grêle ou les fortes pluies, qui peuvent endommager les feuilles, les fruits ou les fleurs.
  3. Résilience face aux périodes de canicule :
    • La ventilation naturelle, les systèmes d’ombrage et les réservoirs d’eau permettent de maintenir un climat frais même en période de canicule. Les plantes souffrent moins du stress thermique, et la serre peut servir de refuge pour les cultures sensibles aux fortes chaleurs.
    • En cas de sécheresse, la serre protège les plantes de l’évaporation excessive, et la récupération d’eau de pluie peut être utilisée pour l’irrigation, réduisant la consommation d’eau externe.

Réduction des besoins énergétiques et autonomie accrue

  1. Pas de recours aux énergies fossiles pour le chauffage :
    • Contrairement aux serres chauffées conventionnelles, la serre passive ne nécessite pas de chauffage externe, réduisant ainsi les coûts énergétiques et l’empreinte carbone. Elle fonctionne uniquement grâce aux apports solaires et à l’inertie thermique.
    • Cela permet de créer un système de production alimentaire autonome, sans dépendance aux énergies fossiles ou à l’électricité, en accord avec les principes de la permaculture.
  2. Utilisation de matériaux locaux et écologiques :
    • Les serres passives sont souvent construites avec des matériaux naturels et locaux, comme la terre, la pierre, le bois ou le chanvre. Cela réduit l’impact environnemental de la construction et favorise l’économie locale.
    • L’utilisation de matériaux recyclés, comme des vieilles fenêtres ou des bidons pour le stockage de la chaleur, permet de valoriser les ressources existantes et de réduire les coûts.
  3. Autonomie alimentaire accrue :
    • En prolongeant la saison de culture et en diversifiant les espèces cultivées, la serre passive contribue à l’autonomie alimentaire du foyer. Elle permet de produire des fruits et légumes frais toute l’année, réduisant la dépendance aux achats extérieurs et améliorant la sécurité alimentaire.
    • Elle favorise également la conservation des semences, la production de plants pour le jardin extérieur, et la culture de plantes médicinales ou aromatiques.

Conception et mise en œuvre d’une serre à énergie passive en permaculture

La conception d’une serre à énergie passive doit être adaptée aux conditions climatiques locales, aux besoins de production et aux ressources disponibles. Voici les étapes clés pour la concevoir et la construire efficacement.

Étape 1 : Choisir l’emplacement idéal et préparer le terrain

  1. Orientation et emplacement :
    • Choisis un emplacement bien ensoleillé, avec un dégagement au sud pour capter le maximum de lumière en hiver. Évite les ombres portées par les arbres, les bâtiments ou les collines.
    • Le terrain doit être bien drainé pour éviter les problèmes d’humidité. Si possible, installe la serre en légère pente pour favoriser l’écoulement de l’eau.
  2. Préparation du sol et des fondations :
    • Creuse un trou pour les fondations et ajoute une couche de graviers ou de cailloux pour le drainage. Les fondations doivent être solides pour supporter le poids de la structure et des matériaux de stockage de chaleur.
    • Prévoyez une isolation du sol (liège, polystyrène extrudé) sous le plancher de la serre pour éviter les pertes de chaleur par conduction.
  3. Protection contre le vent :
    • Si possible, place la serre dans une zone protégée des vents dominants, ou crée un brise-vent naturel (haie, talus) pour éviter les déperditions de chaleur et les dommages structurels.
    • Le mur nord, en matériaux lourds, doit être bien isolé pour servir de barrière thermique et coupe-vent.

Étape 2 : Construire la structure de la serre et optimiser l’isolation

  1. Structure en bois ou en métal :
    • Utilise une structure en bois traité naturellement ou en métal pour supporter les parois et le toit de la serre. Le bois est plus isolant, mais le métal peut offrir une plus grande résistance.
    • Les arches ou les chevrons doivent être suffisamment robustes pour supporter le poids de la neige en hiver et résister aux tempêtes.
  2. Parois sud et toit en verre ou polycarbonate :
    • Utilise du verre à double vitrage ou du polycarbonate alvéolaire pour les parois sud et le toit. Ces matériaux laissent passer la lumière tout en offrant une bonne isolation thermique.
    • Assure-toi que les joints sont bien étanches pour éviter les pertes de chaleur et les infiltrations d’eau.
  3. Mur nord isolé et matériaux à forte inertie :
    • Construis le mur nord en matériaux lourds (terre, pierre, briques) et isole-le bien pour maximiser l’inertie thermique. Ce mur servira à stocker et diffuser la chaleur emmagasinée pendant la journée.
    • Tu peux intégrer des bidons d’eau ou des massifs en pierre le long des parois pour augmenter la capacité de stockage de chaleur.

Étape 3 : Installer les systèmes de ventilation et de régulation thermique

  1. Fenêtres et lucarnes pour la ventilation :
    • Prévoyez des ouvertures en haut et en bas des parois sud pour permettre la ventilation croisée. Les fenêtres de toit doivent pouvoir s’ouvrir pour évacuer l’air chaud en été.
    • Les lucarnes peuvent être équipées de systèmes d’ouverture automatique, régulés par la température, pour assurer une ventilation constante.
  2. Systèmes d’ombrage et protection contre la surchauffe :
    • Installe des filets d’ombrage ou des toiles sur les parois sud pour éviter la surchauffe en été. Ces dispositifs peuvent être rétractables ou fixes, selon les besoins.
    • La végétation grimpante ou les arbres caducs plantés à proximité peuvent également fournir une ombre naturelle en été, tout en laissant passer la lumière en hiver.
  3. Réservoirs d’eau et gestion de l’humidité :
    • Place des réservoirs d’eau à l’intérieur de la serre pour augmenter l’inertie thermique et réguler l’humidité. L’eau absorbe la chaleur pendant la journée et la restitue la nuit.
    • Utilise des bacs ou des fosses remplis de cailloux ou de sable pour capter l’excès d’humidité et améliorer le drainage.

Les serres à énergie passive sont un atout précieux en permaculture, permettant de cultiver des plantes toute l’année, même dans des conditions climatiques difficiles. Grâce à une conception intelligente, basée sur les principes du design passif et l’utilisation de matériaux naturels, elles offrent un environnement stable et productif sans recours à des énergies externes. En suivant les étapes de conception et en adaptant la serre aux conditions locales, il est possible de créer un espace de culture résilient, durable et en harmonie avec la nature. 🌿🌞💚

En savoir plus :